VINCENT CANOVA, APICULTEUR ARDÉCHOIS ET PORTE - PAROLE DE L’ABEILLE NOIRE

Le cirque des Boutières au centre de l’Ardèche, qui accueille la ferme familiale et les ruchers de Vincent Canova, dans la vallée de l’Eyrieux, est une zone granitique semi-montagneuse qui s’embaume au moins de juin des effluves suaves des Châtaigniers en fleurs. Les paysages grandioses de ce ‘Berceau de la Châtaigne’ ont vu grandir Vincent, au sein d’une famille d’apiculteurs insérée dans le tissu paysan local. Empreinte d’humilité et d’un profond respect de l’abeille, de la terre et du territoire, leur pratique s’inscrit en harmonie avec la dynamique vitale et en rupture avec la logique productiviste qui place l’homme en maître et possesseur de la nature.

‘‘ Le lien à la nature dans la tradition paysanne a construit notre manière d’être en relation avec les abeilles, l’a façonné à l’image de notre production. Nous privilégions les besoins vitaux des colonies (libre reproduction, cadres à bâtisse libre, essaimage naturel, sédentarité) qui vivent en harmonie avec leur environnement et limitons les productions, de haute qualité.’’

MIEL DE RUCHER CURINS | Alt. 828m. Orientation : Sud

Orienté plein Sud, ce rucher d’altitude mêle le caractère et les arômes intenses du Châtaigner à d’autres essences végétales comme le Serpolet, des plantes de prairie et des fleurs sauvages d’altitude.

‘‘Ici, la douceur confine avec cette force pérenne du Châtaigner. Il se dégage quelque chose de tonique, de persuasif, perméable à une forme de quête qui prolonge les acquis.’’ *

MIEL DE RUCHER LA MAZA | Alt. 477m. Orientation : Sud-sud-est

Situé plus basse altitude, le rucher de la Maza s’inscrit dans un paysage boisé, de type méditerranéen, où les Châtaigniers s’associent aux Chênes pour donner à ce miel son subtil équilibre. Les parfums balsamiques du miellat de Chêne se marient à la complexité et à l’amertume typique du Châtaigner. Il s’agit du miel qui évolue le mieux, avec une cristallisation tardive, parfois même sans cristallisation lorsque les miellats de Chêne sont majoritaires.

‘‘Bel équilibre. Une accroche douce, silencieuse, bienheureuse, sollicitante. Ici le châtaigner reste en arrière-plan, il plante le décor mais sans plus. Nous nous trouvons bien ici dans le patrimoine de l’arbre aux 7 vies.’’*

* Notes de Christophe Perret-Gentil lors de la dégustation en aveugle précédent la sélection des lots

LE DRAME DE L’ABEILLE NOIRE SE JOUE AUTOUR DES CHÂTAIGNIERS.’’

À son métier d’apiculteur, Vincent Canova allie une importante action militante et associative pour la préservation de l’abeille noire, Apis mellifera mellifera. Cette abeille sauvage et autochtone, qui évolue en Europe de l’Ouest depuis près d’un million d’années est actuellement en grand danger du fait des choix de l’apiculture moderne.

L’importation de souches exogènes (près de 200’000 reines sont importées en France chaque année avant d’être multipliées), l’insémination artificielle et la dissémination par transhumance sont autant de facteurs qui fragilisent l’intégrité génétique de la précieuse abeille indigène. L’hybridation entre espèces est impossible à maîtriser dans la situation actuelle, sans zones préservées consacrées à la protection de l’abeille noire.

Dans ce contexte d’urgence, dramatique et marqué par des pratiques apicoles particulièrement agressives en France, Vincent Canova confie «J’ai l’impression d’avoir été élevé par l’abeille noire. Elle me donne du courage, de la force et une profonde confiance. Sa fiabilité et sa persévérance me permettent de travailler dans un grand confort.»

Si la productivité de l’abeille noire est moins importante que celle de ses cousines domestiques, plus fragiles et devenues dépendantes de l’apiculteur, la rusticité de la précieuse Apis mellifera mellifera lui offre une plus grande diversité comportementale et une résilience nettement supérieure: des qualités qui devraient pourtant être recherchées et valorisées en période du bouleversement climatique actuel.

«Les enjeux autour de l’abeille noire dépassent de loin les intérêts apicoles.» En tant que partie prenante - et non des moindres - de la ‘Communauté du vivant’, cette symphonie dans laquelle nous sommes interreliés à tous les organismes vivants, sa disparation aurait des répercutions énormes sur l’ensemble du vivant. Devant l’inaction des pouvoirs publics et des institutions, il est d’une importance cruciale que le grand public accède à ces informations pour que notre abeille historique, naturelle et sauvage puisse subsister.

Crédit photos Pierre Calvat